Mike Taylor
Partie 5, Peinture, section 4 : lumière et ombre (page 78)
(Auteur : Michael Taylor, traduction : Stéphane Coudert, avec l'autorisation de Mark Taylor).
La différence fondamentale entre la peinture de ronde-bosse et de plat est l’usage de la lumière et de l’ombre. Alors que ces qualités servent à augmenter la forme tri-dimensionnelle pour une figurine en ronde-bosse, elles doivent être utilisées pour créer l’illusion de profondeur et de solidité sur un plat. Si l’on reprend l’exemple précédent de la manche, on voit que nous avons donné forme à un plat, surface à deux dimensions, de la même façon qu’un artiste peint une toile. La méthode adoptée s’applique sur la plupart des surfaces de plat. Cependant, avant de vous précipiter à finir votre première série de figurines, il a plusieurs autres points qui doivent être pris en compte : le premier concerne la lumière. DirectionQuand on observe la gravure d’un plat, on note que les positions de la lumière et de l’ombre sont déjà suggérées à la surface de la figurine. Cela peut constituer un guide au moment de choisir la direction de la lumière pour peindre. Une source de lumière fixe devrait être établie avant tout commencement de peinture. Sa position n’est pas importante en soi, mais une fois décidé, ne doit pas être changée (ceci s’applique non seulement quand on travaille sur une figurine seule, mais aussi sur plusieurs figurines qui seront présentées ensembles). Quand la lumière frappe un objet, elle crée des hautes lumières sur toutes les surfaces qui lui font face et de l’ombre sur les autres. Ainsi, si la source de lumière est située en haut à gauche, l’ombre apparaîtra en bas à droite ; c’est la direction de la lumière choisie par la plupart des peintres, et elle permet à la figurine de recevoir toute la gamme de valeurs tonales. Sources
La lumière est divisée en deux sources basiques : naturelle et artificielle. Dans ce cas, nous ne parlons des conditions dans lesquelles nous peignons, mais plutôt celles qui sont représentées quand on montre les figurines dans une scénette ou un diorama. Ainsi toute approche concernant les zones de lumières et d’ombres dépendra du choix de ces sources. Par exemple si plusieurs figurines sont représentées sous une lumière du jour (lumière naturelle), leurs zones lumineuses seront toutes positionnées de la même façon – côté soleil. Par contre, si ces figurines étaient présentées dans un diorama en boîte représentant une pièce éclairée artificiellement, les zones lumineuses pourraient considérablement différer de l’une à l’autre. La raison en est que, en perspective, les rayons du soleil sont considérés comme étant parallèles entre eux, alors que ceux de la lumière artificielle irradient dans toutes les directions depuis la source lumineuse.
Bien sûr, les rayons du soleil s’étalent dans toutes les directions, mais combien de fois voyons-nous le soleil lui-même représenté dans un diorama ? Parce que le soleil est très éloigné, ses rayons ne provoqueront pas de zones lumineuses variées sur une petite surface, et ainsi toutes les figurines dans cette surface recevront le même traitement.
Inversement, quand une source de lumière artificielle doit être représentée (et cela se voit bien dans un diorama), il est essentiel de connaître la position exacte de chaque figurine par rapport à cette source avant de commencer la peinture. Alors seulement on pourra donner à la figurine ses éclaircies et ses ombres. Zones éclairées
Pour souligner la présence de la lumière, on donne à la figurine des contrastes tonals. Du fait de leur taille, les plats nécessitent beaucoup plus de contrastes que leurs homologues en ronde-bosse et toutes les valeurs tonales doivent être poussées à leurs extrêmes. Les plus claires de ces valeurs (données aux zones qui font face à la source de lumière) sont appelées « zones de surbrillance », et une concentration de lumière sur un seul point – habituellement, mais pas toujours, à l’intérieur de cette zone – est appelée un « reflet » (j’hésite sur cette traduction de « highlight », terme pour lequel il ne me semble pas exister d’autre terme générique consacré en français ; on pourrait aussi parler de « spot », NdT). À cette fin, les reflets sont représentés simplement en ajoutant et en fondant légèrement du pur Titanium White dans la zone de surbrillance. L’effet d’un reflet n’est jamais aussi fort que lorsqu’il est placé dans une zone sombre (à cause du contraste), mais que se passe-t-il quand la surface à éclairer est déjà blanche ?
L’astuce consiste à ne pas avoir du tout de blanc pure comme base, mais de travailler sur une légère modification de cette couleur. En ajoutant une touche d’ocre, d’orange ou de brun au blanc, sa brillance peut être réduite suffisamment tout en lui permettant de continuer à paraître blanche. Quand la peinture est sèche, le Titanium White peut être ajouté à la zone claire, produisant le contraste nécessaire.
Une autre méthode est de recourir au primer. Le blanc mat Humbrol possède une merveilleuse intensité, surtout lorsqu’il est appliqué sur une couleur à l’huile. Plus encore, lorsque l’on peint des vêtements, souvenez-vous que les couleurs claires reflètent plus de lumière que les foncées, et donc n’ombrez qu’au strict minimum.
Des contrastes brillants de couleurs peuvent apparaître impressionnants sur des plats, jamais autant que lorsqu’ils sont positionnés dans des zones éclairées, et beaucoup d’effets convaincants sont accomplis avec des combinaisons de couleurs inattendues. Pour éclairer du bleu de Prusse, par exemple, la plupart des peintres éclairent la couleur de base, la modifiant jusqu’à atteindre le blanc pur. Cependant, si une touche de Winsor Green est ajoutée (donnant au bleu pâle une nuance de turquoise), le reflet est accentué et l’effet général complètement transformé. De la même manière, des roses pâles peuvent être ajoutés pour éclairer le pourpre, du jaune pour le vert, etc. Du jaune peut aussi être utilisé le rouge (ne jamais utiliser de blanc, à moins que du rose soit requis) spécialement dans les zones éclairées, cette couleur, ajoutée au blanc est celle qui se rapproche le plus de la lumière pure. Lumière réfléchie
En peinture, ombre et lumière peuvent difficilement être séparées, et à l’intérieur des zones d’ombre, il y a en fait une autre sorte de lumière à trouver : la lumière réfléchie. Plus l’espace autour d’un objet est grand, plus cet objet recevra de lumière. La lumière peut aussi rebondir sur les surfaces environnantes et toucher des parties d’objets qui ne sont pas éclairés, être reflétée, ou éclairer des zones ombrées. La quantité de lumière réfléchie visible va toujours dépendre à la fois de la forme de l’objet receveur et de l’angle de ses surfaces de réflexion. Un objet sphérique, par exemple, va habituellement présenter un arc de lumière (similaire à un éclat) derrière sa zone sombre, alors qu’un objet avec une large surface plate pourra refléter, ou absorber la lumière sur une zone considérable. Si vous étudiez le char Persan (je renvoie à l’ouvrage pour les illustrations, NdT) vous verrez que la valeur tonale clair la plus élevée a été donnée à l’avant du véhicule. Pour souligner cet abrupt changement de direction du plan (appelé parfois le « turning edge », littéralement « bord tournant », voir le lexique, NdT), une ombre de transition puissante a été appliquée de la manière habituelle. Cependant, plutôt que de donner au plan ombré la même valeur tonale qu’au bord, une lumière réfléchie a été ajoutée.
Le sujet de la lumière réfléchie peut être très complexe (surtout concernant les armures) et, pour cette raison, est considéré comme peu adapté aux débutants. Pourtant, comme son utilisation peut grandement améliorer les formes, la profondeur et le réalisme des objets, je pense que certains effets devraient être expérimentés dès le début. Une des astuces les plus courantes en peinture de plat est de placer une légère éclaircie derrière la zone la plus sombre d’une zone ombrée. En général, cela s’applique aux objets sphériques ou cylindriques, et est particulièrement efficace sur les casques. Quand elle est appliquée, cette éclaircie (en fait, cette lumière réfléchie) doit toujours suivre la forme de l’objet – un arc sur une sphère ; un trait sur un cylindre -et ne doit jamais être plus claire que les zones éclairées principales.
Les couleurs utilisées pour la lumière réfléchie vont largement dépendre de la couleur locale de l’objet et de toute couleur réfléchie, mais ne vous restreignez pas seulement à elles. L’effet du sable du désert se réfléchissant par-dessous un animal peut être grandement accru quand de l’orange est ajouté. Une accentuation peut être obtenue sur la lumière réfléchie sur une peau noire en utilisant un turquoise vif, à la place du bleu pâle habituel. Ces résultats et bien d’autres ne peuvent être atteint que si l’on a le courage de se lancer, donc essayez des choses nouvelles : modifiez les couleurs, exagérez et expérimentez – la récompense pourra être une plus grande sensation de réalisme de votre travail. Ombrage
Le terme « d’ombrage » ne doit pas être confondu avec le mot « ombre ». Là où l’ombrage est causé par une absence de lumière, une ombre est le résultat d’une obstruction de la lumière (voir section 5 : Ombres portées).
Ombrer un objet ou une zone consiste à lui donner une valeur tonale pour foncée, ce qui suppose un peu plus que d’assombrir sa couleur locale ou sa couleur de base. Pourtant, de même que les couleurs claires « avancent » et les foncées « reculent », plus une lumière est claire, plus elle est difficile à foncer. La raison en est que les couleurs claires requièrent une gamme bien plus importante de valeurs tonales que les foncées, et que, lorsqu’elles sont ombrées, elles peuvent aller d’une teinte éclatante à un noir presque pur. Pour cette raison, la couleur la plus difficile à manipuler est le blanc.
Pour ombrer avec succès du blanc, deux points doivent être gardés en mémoire : gardez toujours un ombrage simple, et ne retouchez les zones d’éclaircies que quand l’ombrage est sec. Le premier de ces points peut sembler en contradiction avec la nécessité d’un contraste extrême pour les plats, et, de fait, le blanc est une exception à la règle. Trop de contraste peut totalement gâcher l’effet, faisant paraître irréels les vêtements par exemple. De même, quand on travaille sur une surface aussi limitée, le blanc est facilement souillé, et il en résulte un patchwork de valeurs tonales. En bref, gardez à la plus grande partie des zones blanches une couleur blanche.
Les couleurs utilisées pour ombrer le blanc varient d’un peintre à l’autre, mais vont généralement de bruns-jaunes au gris-bleus. Mélanger seulement du noir et du blanc donne ce que l’on appelle un « gris mort », qui devra toujours être modifié en ajoutant une troisième couleur. Pour un effet vraiment doux, essayez d’ajouter un peu de Cobalt Violet à un gris mort : cela donne l’impression de tuer la grisaille et permet à la lumière de pénétrer sa valeur, particulièrement quand on l’utilise pour une ombre.
Le rouge est une autre couleur que beaucoup de peintres trouvent difficile à ombrer, et, même s’il est vrai que le brun ou le noir ajoutés au noir vont assombrir son ton, ils vont également changer sa couleur. Comme noir et rouge donnent un brun et que le brun n’est pas un ombrage plus foncé du rouge, aucune ne peut être utilisées avec le seul but d’ombrer le rouge. Indian Red est la couleur idéale et modifiera tous les autres rouges. Plus encore, elle a un excellent pouvoir couvrant et n’apparaîtra pas brune quand on l’assombrira au noir.
Toutes les couleurs sombres sont relativement faciles à ombrer, mais, comme avec le blanc, il faut faire attention à ne pas trop ombrer. À part pour les plis profonds des vêtements, les zones ombrées des couleurs sombres ne se différencieront pas beaucoup de leurs couleurs de bases, ce qui nous amène au point final – la balance tonale. De même qu’un plat besoin de contraste tonal pour renforcer son illusion de solidité, il aura besoin d’une balance tonale pour unifier ce contraste. Pour cela, quand on travaille sur une zone ombrée, les peintres doivent toujours vérifier les valeurs des autres zones. La façon la plus logique de le faire est de sélectionner un ton clé. Par exemple, quand vous travaillez depuis une référence (une gravure d’uniforme ou une photo), trouvez sur l’image une zone qui représente une valeur de ton moyenne – pas trop foncée, pas trop claire (souvenez-vous que cela n’a rien à voir avec la couleur). Cela constitue votre « valeur clé ». Quand vous travaillez sur les zones ombrées, comparez la valeur de ton de chaque zone avec votre valeur clé, ce qui vous assurera que toutes les valeurs se positionnent les unes par rapport aux autres et qu’il en résulte une figurine équilibrée.