Mike Taylor
Partie 5, Peinture, section 12 : Couleurs utilisées dans les temps antiques (page 103)

(Auteur : Michael Taylor, traduction : Stéphane Coudert, avec l'autorisation de Mark Taylor).

(Le lecteur pourra également se reporter à deux articles écrits par Mike Taylor dans la revue "Figurines" :
  • n°103 : Les Dieux de l'ancienne Egypte,
  • n°107 : La mythologie en plats d'étain.)
Il y a quantités de séries décrivant la vie d’époques antiques, plusieurs d’entre elles proposant les plus belles figurines jamais produites. De même, de nombreux collectionneurs et peintres se spécialisent dans ce domaine. L’histoire des civilisations passées offre une étendue formidable de recherche et évoque des images de cérémonies de toute splendeur ou de fables. Cela et d’autres facteurs, comme l’absolue variété de sujets et (dans certains cas) la simplicité des costumes, sont les principales raisons pour laquelle une majorité de peintres débutant les plats choisissent l’antiquité comme point de départ. Cependant, indépendamment de l’enthousiasme suscité, on ne doit pas négliger le fait que la variété de couleurs connue pendant l’antiquité n’était pas aussi grande que ce qu’elle est de nos jours et que, à une ou deux exceptions près, elles étaient certainement moins vives. Cela ne signifiera pas que la peinture de tels sujets sera terne ou sans inspiration – au contraire, des flashs de couleur forte sur des vêtements unis et simples peuvent apparaître très saisissants. Prenez les anciens égyptiens par exemple : que peut-il y avoir de plus impressionnant qu’un grand collier turquoise et or porté sur une toge blanche et transparente ? Cependant, les peintres doivent faire attention à ne pas utiliser que des couleurs puissantes et brillantes : le rouge, par exemple, sera dans la plupart des cas un Indian Red, pas un Flame ou un Scarlet. Il faut aussi se souvenir que la plupart des civilisations anciennes (ou celles le plus communément représentées en plats) étaient implantées au Moyen-Orient, où il faisait chaud et poussiéreux et où les couleurs étaient décolorées par le soleil.

On dit que sept pigments étaient connus à cette époque : blanc, jaune, rouge, bleu, vert, noir et pourpre, desquels on réalisait des variantes. Dans un article publié par la British Flat Figure Society (Journal n°3, octobre 1986) était mentionnée une liste des couleurs favorites selon les nationalités. Une partie de cette liste est reproduite ici, avec quelques additions :

  • Assyriens et Babyloniens
    Vert foncé, bleu foncé, terre rouge, jaune d’or, vert foncé riche, ocre, prune, noir et pourpre (violet). Le pourpre véritable était très cher, et donc réservé aux sujets royaux et aux personnalités très riches. Il a également une grande variété de nuances.
  • Bretons et Gaulois
    Cramoisi, pastel (un bleu verdâtre), brun, vert et noir pour les nobles ; les couleurs étaient plus ternes pour les classes inférieures. Bretons et Gaulois étaient connus pour leurs vêtements rayés ou à carreaux, et il a été dit que les Bretons portaient leurs rayures verticalement, alors que les Gaulois les portaient horizontalement – autour du corps. Les carreaux formaient souvent un patchwork de quatre ou cinq différentes couleurs.
  • Carthaginois
    Jaune, noir et vermillon, mais plutôt en couleurs criardes.
  • Étrusques
    Indian Red, noir, ocre, bleu-vert, blanc, brun et jaune crème.
  • Germains
    Comme pour les Bretons et Gaulois, mais plus ternes.
  • Grecs
    Violet-bleu, violet-rouge, rouge vin, jaune safran, ocre, vert pâle, indigo, brun clair, et jaune verdâtre.
  • Perses
    Similaires aux Assyriens et Babyloniens, un rouge mat étant prédominant. Le pourpre était réservé à la royauté.
  • Romains
    Gamme de pourpre depuis une teinte brune jusqu’à une nuance rouge (une fois encore, réservé aux nobles), brun, indigo (mélangé à la garance pour obtenir un simili pourpre et avec du safran pour un vert vif) et garance (depuis un rouge brunâtre jusqu’à un rouge clair) utilisée pour les tuniques des légionnaires de l’Empire.

Les peintres qui se spécialisent dans l’ancienne Égypte ont plus de chance, car les preuves des couleurs de costumes et de la façon de les porter existent encore et sont extrêmement bien documentées. Pour autant, alors que les six couleurs basiques (rouge, jaune, bleu, vert, noir blanc) sont évidentes dans tout l’art égyptien, elles ont souvent une signification symbolique et doivent être étudiées en profondeur pour une précision totale.
Le bleu, par exemple, obtenu du lapis-lazuli (une pierre importante particulièrement prisée par les égyptiens) était considérée digne d’un Dieu. Ainsi la peau d’Amon était toujours de cette couleur, tout comme la coiffe et la barbe d’autres divinités mineures.
Pour les égyptiens, le rouge et le blanc étaient opposés : placés ensemble, ils exprimaient intégrité et perfection. Pendant les célébrations, ils peignaient leur corps d’ocre rouge et portaient des bijoux de cornaline rouge. Des sandales blanches, couleur de la pureté, de la joie et de la sainteté, étaient portées pendant les cérémonies du culte. La couronne blanche de la haute Égypte (bien que faite de jonc vert en fait) et la couronne rouge de la basse Égypte, étaient combinées et portées par le gouverneur unique de l’Égypte tout entière.
Puis il y a le noir, couleur du monde des défunts. Osiris était souvent appelé « le noir », mais en fait, c’était Anubis, Dieu de la mort dont la couleur était le noir. Le Dieu-patron de la nécropole de Thèbes, la reine Ahmes-Nefertari, était aussi représentée avec une peau noire, alors qu’elle n’était pas de descendance nubienne ou négroïde. Tout cela et beaucoup d’autres faits intéressants peuvent être trouvés dans l’ouvrage de Manfred Lurker « Les Dieux et les symboles dans l’ancienne Égypte », publié par Thames and Hudson. Bien entendu, ces informations s’appliquent aux sujets mythologiques, mais comme le quotidien et la religion des anciens égyptiens sont difficilement séparables (et toutes deux bien représentés en plats), les couleurs correctes doivent être adoptées le plus possible.