Mike Taylor
Partie 5, Peinture, section 3 : Mélanger et fondre (page 75)

(Auteur : Michael Taylor, traduction : Stéphane Coudert, avec l'autorisation de Mark Taylor).

Mélanger les peintures à la consistance adéquate est le premier pas vers une peinture de plat réussie, mais cela peut représenter la première pierre d’achoppement pour les débutants.
Certains peintres prônent que la peinture devrait être diluée comme du lait, mais cela permet probablement de faire à peine plus que teinter la couche de fond et de la faire s’écouler sur la figurine. D’un autre côté, si la peinture est trop épaisse, d’autres problèmes tout aussi frustrants surgiront. Le contrôle du medium est essentiel, et vous devriez viser la consistance d’un beurre mou. Pour ceux qui n’ont jamais utilisé l’huile, il est préférable d’essayer sur une figurine de rechange apprêtée, à titre de test.
Placez d’abord un peu de couleur pure sur la palette. Puis, après avoir trempé votre pinceau dans le diluant, étendez la peinture sur une petite surface de la palette. Quand vous avez atteint une douce consistance facile à travailler, placez en une petite quantité sur la figurine et essayez de couvrir une surface complète le plus en douceur possible. Si la peinture coule, c’est qu’elle est trop maigre ; si des traces de pinceau apparaissent, soit la peinture est trop épaisse, soit vous en avez mis trop.

Le but du mélange de couleurs est soit de changer légèrement l’apparence d’une couleur, soit d’en créer une nouvelle ; la plupart du temps, c’est le premier but qui est cherché. Par exemple, en ajoutant un peu de orange à du jaune, vous pouvez faire en sorte que le jaune apparaisse plus chaud ; par contre, si un orange est mélangé à du bleu, une nouvelle couleur est créée. Le nombre de couleurs mélangées en même temps devrait être limité au minimum : deux est idéal ; avec trois ou plus, il y a une perte d’intensité de la couleur et le risque de créer de la boue !
Les couleurs peuvent être mélangées sur la palette ou sur la figurine elle-même, ou les deux. Le sens dans lequel les couleurs sont disposées sur la palette n’est pas important, mais en les plaçant chaque fois dans le même ordre, vous ferez automatiquement connaissance de leur gamme et vous apprendrez à distinguer les couleurs très sombres sans avoir à consulter les étiquettes. Les couleurs pures devraient aussi être disposées sur les bords de la palette, ce qui laisse une large zone de mélange au centre. Bien entendu, les choix de couleurs dépendront du sujet à peindre, et comme la peinture ne peut pas être réintroduite dans les tubes, ne disposez que la quantité utile à chaque fois. Le Flake White sera utilisé plus que toute autre couleur, donc soyez généreux avec lui et veillez à toujours en disposer.

Avant de mélanger et de fondre, il est nécessaire d’en savoir un peu à propos de la tonalité, ou « valeur tonale ». La tonalité n’a rien à voir avec la différence entre les couleurs elles-mêmes ; le terme est utilisé pour décrire le caractère relativement clair ou obscur d’une couleur. Par exemple, si nous regardons la photographie en noir et blanc d’une personne qui porte une chemise vert pâle, la clarté de la couleur de la peau (vue en grisaille) peut apparaître comme exactement semblable à celle de la chemise. Bien que chair et chemise soient de différentes couleurs, elles peuvent avoir la même valeur tonale. Une bonne méthode pour observer cela est d’examiner une figurine peinte au travers d’une pièce d’acétate teintée de rouge, ou de n’importe quel autre film transparent rouge. Presque toutes les couleurs (mais pas toutes) disparaissent, ce qui permet de voir plus clairement leur valeur tonale.
La façon la plus simple de créer une gamme de valeurs de couleurs est de modifier une couleur de base (pure) en l’éclaircissant et en l’assombrissant. Prenez d’abord un peu de pigment pur (du bleu par exemple) et placez-le au milieu de la palette. Puis ajoutez un peu de blanc d’un côté et du noir de l’autre. Maintenant, avec deux pinceaux propres, et en utilisant les deux mains, mélangez le blanc d’un côté et le noir de l’autre. Faites attention à faire en sorte que noir et blanc ne se touchent pas, car cela créerait du gris. En mélangeant doucement et en étalant ces trois pigments dans toutes les directions, une gamme de valeurs tonales va se créer, donnant dans le même temps au novice l’expérience d’une manipulation des couleurs. Répétez cet exercice plusieurs fois en utilisant différentes couleurs. Cela ne va pas seulement révéler les différentes textures des peintures, mais cela va aussi montrer qu’une couleur peut avoir sur une autre.
Tous les mélanges de couleurs sont faits de la même façon, et ne réclament pas plus de technique. Quant à savoir quoi mélanger avec quoi, l’expérimentation est le meilleur professeur. Les peintres apprennent probablement plus les mélanges par les concours et les erreurs, que par une liste d’instructions établies avant eux. Cependant, une connaissance pratique du cercle chromatique est très utile, et des exemples en sont disponibles dans tous les magasins d’art.

L’une des fautes les plus courantes en matière de mélange de couleurs est d’oublier ce que vous avez mélangé au début du travail. Pour cette raison, il est avisé – particulièrement quand on laisse des figurines inachevées pendant une longue période ou quand une couleur assortie est nécessaire ultérieurement – de garder tous les mélanges cruciaux griffonnés dans un carnet.

Fondus
La technique de fondu est utilisée pour faire une douce et subtile transition entre les couleurs et leurs valeurs tonales. Plus la transition doit être graduelle, plus la technique requise est subtile. Pour donner forme et profondeur à un plat, objet en deux dimensions, la peinture est appliquée, mélangée et fondue en trois valeurs basiques (claire, moyenne et foncée) et c’est la transition entre ces valeurs qui va déterminer la forme de l’objet.
Pour ceux qui n’ont jamais peint de plat auparavant, je décrirai comment faire ces transitions en utilisant le manche d’une figurine à titre d’exemple. Couvrez d’abord toute la surface de la manche avec un ton bleu moyen, en faisant attention à ne pas trop utiliser de peinture. Une fois réalisée une teinte plate et régulière, ajoutez un peu de Flake White sur le bord extérieur de la manche, depuis le haut vers le bas. Vous appliquerez la peinture « dans le frais », et vous n’avez donc pas à vous inquiéter si le blanc se teinte de bleu. En utilisant le même pinceau, mélanger doucement le bleu et le blanc sur toute la longueur vers le bas de la manche. Cette partie bleue la plus claire ne devrait couvrir qu’un tiers de la manche, laissant deux tiers pour le ton moyen. Pour donner à ces deux valeurs une transition douce et graduelle, mélangez les ensemble en utilisant un pinceau propre et sec. Passez le pinceau très doucement et très légèrement d’avant en arrière, en levant le pinceau entre chaque passage (Le « feathering », « plumage » en anglais, NdT). À cette fin, utilisez toujours un pinceau le plus large possible afin de laisser le moins de traces possible, mais pas si large qu’il effectuerait le mélange sur toute la largeur de la manche, sinon, celle-ci reviendrait à une couleur unique. Souvenez-vous que les huiles ont une consistance lourde et ont tendance à s’accumuler rapidement, ce qui rend la transition plus difficile à réaliser. N’essayez jamais de corriger cela en ajoutant du diluant : soit cela enlèvera la peinture et créera des tâches, soit cela accélérera le séchage, rendant le mélange impossible. À la place, essuyez de temps en temps le pinceau sur un papier absorbant entre les passages, afin d’enlever l’excédent de peinture. Finalement, ajouter la troisième valeur, qui est faite exactement de la même façon, mais avec du noir sur le côté opposé. Utilisez un pinceau propre et sec, sinon chaque ajout de blanc donnerait du gris ou du bleu foncé. Encore une fois, soyez précautionneux afin de ne pas effacer la valeur médiane. Au final, la manche doit apparaître avec un ombrage et de la profondeur.

Ceci n’est cependant que la première couche, et, bien souvent, le résultat sera imparfait. Quand la peinture a séché, une seconde couche peut être réalisée (sans toucher désormais au ton intermédiaire) qui traitera la surface avec plus de douceur. Les mêmes valeurs de couleur seront mélangées sur la palette : blanc/bleu pour les parties les plus claires de la manche, noir/bleu pour les foncées. Elles peuvent être appliquées et fondues beaucoup plus subtilement que précédemment, et pendant le même temps, tous les plis de la manche sont marqués. Ceci est fait en plaçant les tons les plus foncés dans les creux de la manche (les parties inférieures des plis) et les plus clairs sur le dessus. Les valeurs tonales continuent à être modifiées jusqu’à ce que l’effet souhaité soit obtenu.

Les fondus ont également deux formes : frontières dures ou douces. En termes simples, cela décrit les degrés de flou du fondu de la frontière mélangées entre les couleurs et les valeurs. Quand une transition est douce et graduelle, elle a une frontière « douce », mais si la transition est abrupte, elle a une frontière « dure ». La forme de l’objet lui-même vous dictera laquelle des deux vous devez utiliser. Par exemple, plus l’objet est rond (sphères, bras, corps de chevaux, etc …), plus la transition est douce et graduelle. Plus l’objet est angulaire, plus elle devient tranchante et soudaine. En peinture, la différence requise dans la technique est d’élargir la zone de transition (en utilisant un pinceau plus large et plus souple) pour une frontière douce et de garder cette zone étroite pour la frontière dure.
Travaillez toujours zone par zone sur la figurine (fondus ou autres) et, si possible, finissez la complètement avant d’engager la suivante. Ceci évite la pagaille d’avoir plusieurs parties en cours en même temps, et facilite la vie. Puis, quand le fondu est terminé et que la peinture s’est reposée (a séché un peu), brossez très doucement toute la zone avec un pinceau propre et sec en poils d’écureuil. Cela aidera à enlever toute trace de pinceau et ajoutera de la subtilité à votre travail.